Système de facturation électronique : Guide TPE/PME 2026/27

La fin du flou : le calendrier 2026/2027 est fixé

La France s'engage dans une transformation majeure avec la généralisation progressive du système de facturation électronique à compter de septembre 2026. Cette évolution numérique concerne environ 4 millions d'entreprises françaises (source : INSEE, dispositif Ésane 2022). Il s'agit d'un véritable levier de modernisation destiné à transformer durablement les relations commerciales interentreprises.

[[tool-section]]

Le calendrier précis, défini par l'article 91 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024, a connu plusieurs reports successifs pour permettre aux acteurs économiques et technologiques de se préparer de manière adéquate. Initialement prévue pour juillet 2024, l'entrée en vigueur a été reportée une première fois en juillet 2023, puis définitivement fixée aux dates actuelles par la loi de finances 2024. Aujourd'hui, les échéances sont claires : 1er septembre 2026 pour une première phase concernant la réception universelle et l'émission des grandes entreprises, puis 1er septembre 2027 pour l'achèvement de la généralisation avec l'obligation d'émission pour les TPE et PME.

Un décret peut toutefois fixer une date ultérieure ne dépassant pas le 1er décembre 2026 ou le 1er décembre 2027 selon les cas (article 91, LOI n° 2023-1322).

Avant d'examiner ce calendrier en détail, il convient de préciser la nature même de ce système de facturation électronique et ce qui le distingue des pratiques actuelles de dématérialisation.

Qu'est-ce qu'un système de facturation électronique ?

Un système de facturation électronique désigne la numérisation complète du processus de facturation, utilisant des logiciels ou services spécialisés pour automatiser l'intégralité des étapes, depuis la création jusqu'à l'archivage. Cette approche va bien au-delà de la simple dématérialisation par numérisation ou conversion PDF : elle implique l'utilisation de formats de données structurées permettant un traitement automatique par les systèmes informatiques.

Le processus débute par la génération d'une facture dans un système ERP ou une plateforme dédiée, se poursuit par l'intégration et la livraison des données via des solutions sécurisées avec une phase de validation automatisée garantissant la conformité réglementaire et s'achève par la livraison au destinataire dans son format préféré.

Selon la norme AFNOR XP Z12-012 publiée en mai 2025, trois formats structurés constituent le socle minimum obligatoire : UBL (Universal Business Language), CII (Cross Industry Invoice) et Factur-X (format mixte PDF/A-3 avec XML intégré).

Cette définition technique établie, il est essentiel de comprendre qui sont les différents acteurs chargés de faire fonctionner ce système et quel rôle ils jouent concrètement.

Les acteurs du système : PPF, PDP et OD expliqués

La mise en œuvre de la facturation électronique repose sur un écosystème d'acteurs aux rôles complémentaires. Comprendre leurs missions respectives permet d'anticiper les choix stratégiques que votre entreprise devra effectuer.

Le Portail Public de Facturation (PPF) : un rôle réorienté

Contrairement à certaines idées reçues, le Portail Public de Facturation n'a pas été abandonné mais a fait l'objet d'une réorientation stratégique majeure. Le communiqué de presse officiel du 15 octobre 2024 du Ministère de l'Économie précise que "le projet sera poursuivi en privilégiant la construction d'un annuaire des destinataires [...] et d'un concentrateur des données".

Cette plateforme ne proposera donc plus de service d'émission et de réception de factures comme initialement prévu. Son rôle est désormais double :

- Fonction d'annuaire : Le PPF gère le répertoire des entreprises et de leurs adresses de facturation. Cet annuaire est opérationnel depuis le 18 septembre 2025 et référence déjà plus de 120 000 entreprises (source : impots.gouv.fr, actualité du 18 septembre 2025).

- Fonction de concentrateur : Le portail collecte les données transmises par les PDP pour le compte de l'administration fiscale, assurant ainsi la supervision et le contrôle de la TVA.

Le PPF demeure donc un élément central du dispositif, bien que ses missions initiales aient été recentrées sur ces deux fonctions essentielles. Cette évolution confère une importance accrue aux plateformes privées, qui deviennent les interlocuteurs opérationnels incontournables.

Les Plateformes de Dématérialisation Partenaires (PDP)

Face à la réorientation du PPF, les PDP constituent désormais les acteurs opérationnels principaux du système. Une PDP est un intermédiaire immatriculé par l'administration fiscale française (service d'immatriculation de Lille), agissant comme tiers de confiance dans l'écosystème de la facturation électronique. Ces plateformes sont des entreprises privées certifiées après avoir satisfait à des exigences rigoureuses en matière de sécurité, de solvabilité et de capacité technique. L'immatriculation est délivrée pour une durée de trois ans renouvelable (source : impots.gouv.fr).

Le service d'immatriculation a ouvert le 2 mai 2023. À ce jour, plus de 100 plateformes ont obtenu une immatriculation sous réserve (données octobre 2025).

Les missions d'une PDP s'articulent autour de plusieurs fonctions critiques :

• L'émission, la réception et la transmission des factures électroniques entre fournisseurs et clients
• La conversion entre différents formats de factures
• L'extraction et la transmission de certaines données à l'administration fiscale
• La gestion de la transmission des données d'e-reporting pour les transactions ne relevant pas de la facturation électronique obligatoire
• La transmission des données de paiement (uniquement pour les prestations de services avec TVA sur encaissement, sous conditions spécifiques)

Cependant, toutes les plateformes de dématérialisation ne bénéficient pas nécessairement de ce statut officiel, ce qui nous amène à examiner la situation des opérateurs non immatriculés.

Les Opérateurs de Dématérialisation (OD)

Les Opérateurs de Dématérialisation continuent d'exister dans le paysage de la facturation électronique, mais avec des limitations fonctionnelles importantes. Selon le site officiel impots.gouv.fr : "Une entreprise pourra continuer à recourir aux services d'un opérateur de dématérialisation. Toutefois, à défaut d'immatriculation par l'administration fiscale, cet opérateur n'aura pas la qualité de plateforme de dématérialisation partenaire."

Concrètement, les OD non immatriculés peuvent poursuivre certaines activités de dématérialisation, mais ne peuvent pas :

• Transmettre les factures électroniques aux plateformes des clients
• Recevoir des factures électroniques pour le compte de l'entreprise
• Transmettre directement les données à l'administration fiscale

Pour participer pleinement au nouveau système et offrir un service complet à leurs clients, les OD doivent donc obtenir le statut de PDP par la procédure d'immatriculation.

Ces précisions sur les acteurs du système étant établies, examinons maintenant en détail le calendrier de mise en œuvre qui vous concerne directement en tant que TPE ou PME.

Le Calendrier Détaillé : que devez-vous VRAIMENT faire en 2026 et 2027 si vous êtes une TPE/PME ?

La réforme s'appliquera en deux phases distinctes, chacune avec des obligations spécifiques selon la taille de votre entreprise. Cette approche progressive vise à faciliter l'adaptation de l'ensemble du tissu économique.

1er septembre 2026 : l'obligation de réception pour tous

À compter du 1er septembre 2026, toutes les entreprises françaises, quelle que soit leur taille, devront être en capacité de recevoir des factures électroniques. Cette obligation universelle de réception s'explique par le fait que les grandes entreprises et entreprises de taille intermédiaire (ETI) auront simultanément l'obligation d'émettre leurs factures au format électronique à cette même date (source : impots.gouv.fr et article 91 de la loi de finances 2024).

Concrètement, cette obligation de réception signifie que chaque entreprise doit :

• Désigner une PDP pour la réception de ses factures électroniques
• Configurer ses systèmes internes pour traiter les nouveaux formats électroniques structurés (UBL, CII ou Factur-X)
• Former ses équipes aux nouveaux processus de traitement des factures dématérialisées

Si vous dirigez une TPE ou une PME, vous devez donc vous préparer dès maintenant à recevoir des factures électroniques de vos fournisseurs, même si vous n'aurez pas encore l'obligation d'en émettre avant septembre 2027.

À noter : Une phase pilote débutera en février 2026, permettant des tests en conditions réelles sans risque de sanction administrative pour les entreprises volontaires (annonce du 18 septembre 2025, impots.gouv.fr). Cette période de test représente une opportunité précieuse pour anticiper la mise en conformité définitive.

Cette première étape franchie, une seconde échéance concernera directement les TPE et PME un an plus tard.

1er septembre 2027 : l'obligation d'émission pour les TPE/PME

Le 1er septembre 2027 constitue la seconde étape majeure avec l'entrée en vigueur de l'obligation d'émission pour les petites et moyennes entreprises ainsi que les micro-entreprises. Cette échéance concerne la très grande majorité des entreprises françaises et représente l'achèvement de la généralisation du système.

À cette date, toutes les entreprises assujetties à la TVA, y compris les plus petites structures, devront émettre leurs factures dans des formats électroniques structurés via des PDP certifiées. Cette seconde phase s'accompagne également de l'obligation de transmettre les données d'e-reporting pour l'ensemble des PME et micro-entreprises.

Ces dates d'application dépendent directement de la classification de votre entreprise, qu'il convient de vérifier avec précision.

Définitions officielles des tailles d'entreprises

La classification officielle, établie par le décret n° 2008-1354 du 18 décembre 2008 (transposition de la Loi de Modernisation de l'Économie), détermine directement vos échéances :

Micro-entreprises : Effectif inférieur à 10 personnes ET chiffre d'affaires annuel inférieur ou égal à 2 millions d'euros (ou total de bilan inférieur ou égal à 2 millions d'euros).

Petites et moyennes entreprises (PME) : Effectif inférieur à 250 employés ET chiffre d'affaires annuel inférieur ou égal à 50 millions d'euros OU total de bilan inférieur ou égal à 43 millions d'euros.

Entreprises de taille intermédiaire (ETI) : Définies par l'article 51 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008. Effectif inférieur à 5 000 personnes ET chiffre d'affaires annuel inférieur ou égal à 1 500 millions d'euros OU total de bilan inférieur ou égal à 2 000 millions d'euros, sans appartenir à la catégorie des PME.

Grandes entreprises : Entreprises dépassant ces seuils.

Les grandes entreprises et ETI sont soumises aux obligations d'émission dès septembre 2026, tandis que les PME et micro-entreprises disposent d'un délai supplémentaire jusqu'en septembre 2027.

Ces obligations calendaires établies, il reste à distinguer deux notions fondamentales qui structurent l'ensemble du dispositif : l'e-invoicing et l'e-reporting.

E-invoicing et e-reporting : quelles différences concrètes pour vous ?

La réforme française introduit une distinction cruciale entre deux types d'obligations qui ne concernent pas les mêmes transactions. Cette différenciation détermine vos obligations déclaratives selon la nature de vos opérations commerciales.

L'e-invoicing : facturation électronique stricto sensu

L'e-invoicing, ou facturation électronique au sens strict, concerne exclusivement les opérations d'achats et de ventes de biens et prestations de services réalisées entre entreprises établies en France et assujetties à la TVA française (périmètre B2B domestique). Cette obligation s'applique aux factures émises dans des formats structurés spécifiques (CII, UBL, Factur-X) et transmises via des PDP certifiées (source : articles 289bis du CGI).

En pratique, toutes vos factures adressées à des clients professionnels français assujettis à la TVA devront obligatoirement transiter par ce système. La simplicité apparente de cette règle cache néanmoins une complexité dès lors que vos transactions sortent de ce périmètre B2B franco-français.

L'e-reporting : déclaration des autres transactions

L'e-reporting désigne la transmission électronique à l'administration des données de transactions qui ne relèvent pas du périmètre de la facturation électronique obligatoire. Cette obligation concerne notamment :

• Les opérations de ventes et prestations de services avec des personnes non assujetties (particuliers, associations non assujetties)
• Les transactions avec des opérateurs établis à l'étranger (B2B international)
• Les exportations et livraisons intracommunautaires
• Les données de paiement pour certaines prestations de services dans des conditions spécifiques

Précision importante sur les données de paiement : L'obligation de transmission des données de paiement s'applique uniquement aux prestations de services lorsque la TVA est due à l'encaissement ET que l'entreprise n'a pas opté pour la TVA sur les débits ET que l'opération ne donne pas lieu à autoliquidation (source : article 290A du CGI et spécifications externes B2B v3.0 de la DGFiP).

La différence fondamentale réside dans le fait que l'e-invoicing traite de factures structurées échangées entre entreprises françaises, tandis que l'e-reporting couvre la déclaration de données relatives à toutes les autres transactions commerciales.

Cette distinction établie, il apparaît légitime de s'interroger sur les bénéfices concrets que votre entreprise peut retirer de cette transformation, au-delà de la contrainte réglementaire.

‍

Pourquoi c'est une opportunité pour votre TPE/PME (au-delà de la contrainte) ?

L'obligation réglementaire ne doit pas occulter les bénéfices tangibles que procure l'adoption de la facturation électronique. De nombreuses entreprises ayant anticipé cette transition témoignent d'améliorations significatives de leurs processus.

Cinq bénéfices majeurs à connaître dès maintenant

1. Gain de temps considérable par l'automatisation

L'automatisation des processus élimine les tâches manuelles chronophages : édition papier, impression, mise sous enveloppe et expédition postale disparaissent. Cette transformation libère un temps précieux que vos équipes peuvent consacrer à des activités commerciales ou stratégiques à plus forte valeur ajoutée.

2. Amélioration de la traçabilité et réduction des délais de paiement

La traçabilité offerte par le système électronique empêche les clients de prétendre qu'ils n'ont pas reçu une facture pour retarder leur règlement. Selon l'étude Quadient/OpinionWay de février 2025 menée auprès de 350 décideurs d'entreprises de 10 salariés et plus, 61% des entreprises ayant amorcé cette transition constatent une amélioration de leur productivité, contre 59% l'année précédente. Un nombre équivalent d'entreprises estime que cette évolution a permis de réduire leurs coûts et d'accélérer les délais de paiement.

3. Exploitation des données pour un pilotage stratégique

Les données de facturation et de paiement, normalisées et structurées, peuvent être exploitées au service de votre stratégie d'entreprise. Elles offrent une vision enrichie des relations commerciales et de leur impact financier, facilitant la prise de décision et l'anticipation.

4. Réduction significative des erreurs

Les formats standardisés et la transmission automatisée diminuent fortement le risque d'erreur humaine. Chaque facture électronique est unique et transmise via une plateforme certifiée, garantissant l'authenticité, l'intégrité et la conservation des documents conformément aux exigences réglementaires.

5. Impact environnemental positif

La suppression des impressions, du papier et des envois postaux s'inscrit dans une logique écoresponsable qui améliore votre image RSE tout en générant des économies directes sur les consommables et affranchissements.

Ces bénéfices qualitatifs s'accompagnent d'économies financières mesurables qu'il convient de quantifier.

Des économies réelles et mesurables

Les économies directes les plus visibles concernent la suppression des coûts de papier, d'impression, d'enveloppes et d'affranchissement. Pour une entreprise émettant plusieurs centaines de factures par mois, ces économies peuvent rapidement compenser les coûts d'abonnement à une PDP.

Les économies indirectes, souvent plus importantes mais moins immédiatement visibles, incluent :

• La réduction des erreurs de saisie et de traitement, diminuant les coûts de correction et de gestion des litiges
• L'accélération des délais de paiement, améliorant votre trésorerie et réduisant vos besoins de financement externe
• L'amélioration de la traçabilité, facilitant les contrôles et audits et réduisant les coûts de compliance

Ces opportunités identifiées, la question centrale devient : comment choisir la solution technique la plus adaptée à votre situation spécifique ?